En 2016, à l’occasion de la Journée mondiale de l’homophobie, la transphobie et la biphobie qui a eu pour thème la santé mentale et le bien-être, le programme commun des Nations Unies sur le VIH/SIDA (ONUSIDA) a rappelé les difficultés rencontrées par de nombreuses personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres à travers le monde, qui « vivent dans la peur, dans l’isolement et sans pouvoir bénéficier de services de santé vitaux ».

« La crainte de mauvais traitements ou de discriminations exercées par des agents de santé les empêche d’accéder aux services de dépistage et de traitement du VIH. De plus, un pourcentage élevé de personnes LGBT [1] est confronté à l’isolement et à la discrimination dans leur environnement social immédiat, ce qui nuit à leur santé mentale. » À plusieurs reprises, l’ONUSIDA et le Fonds mondial de lutte contre le Sida, la tuberculose et le paludisme ont appelé les gouvernements à abroger les lois homophobes  et à ne « laisser personne de côté » en permettant un accès complet à des soins de santé de qualité, y compris aux soins de santé mentale, pour les personnes LGBT. La République Démocratique du Congo (RDC) n’a pas de loi pénalisant l’homosexualité à proprement parler. En effet, le Code pénal de la RDC ne contient aucune disposition interdisant les actes sexuels entre adultes consentant·e·s de même sexe. Cependant, l’absence de pénalisation ne protège pas les LGBT des prêches homophobes discrimina toires proférés par certain·e·s actrices·teurs religieuses·eux, de la stigmatisation, de l’exclusion sociale, de la peur du rejet par la sphère familiale, ainsi que de l’homophobie au sein du corps médical. C’est dans ce contexte que l’ONG congolaise PASCO [2] agit pour que les HSH [3] et les personnes transgenres bénéficient d’un meilleur accès à la santé. En effet, en 2020, on estime la prévalence du VIH chez les HSH à 7,1% contre 0,8% en moyenne pour la population générale congolaise âgée de 15 à 49 ans. Il n’y a pas de données solides concernant les personnes transgenres, mais des études en cours en RDC permettraient de remédier à ces lacunes.

Michel Lay Mayamba, coordonnateur national de PASCO a répondu aux questions de Solsoc.

Pour quelles raisons PASCO a-t-elle fait le choix de cibler les HSH et les personnes transgenres à travers ses actions ?

Avant de créer PASCO, j’ai travaillé avec Médecins Sans Frontières Belgique où j’ai acquis de l’expérience auprès de ces communautés. Nous avons choisi de cibler celles-ci car elles subissent des stigmatisations et des discriminations qui entravent leur accès aux soins du VIH et de la tuberculose, alors qu’elles y sont les plus exposées. Selon notre rapport global de 2020, 7 026 HSH ont été sensibilisés dans le cadre de nos actions, 6 380 dépistés, 219 déclarés séropositifs. 644 personnes transgenres ont été sensibilisées, 556 ont été dépistées et 15 ont été déclarées séropositives.

Quel a été l’impact du Covid-19 sur vos activités ?

L’impact a été très négatif sur une partie des bénéficiaires qui sont habitué·e·s à gagner leur vie par le travail de nuit. Le confinement et les couvre-feux ont freiné brutalement leurs activités. Il y a donc eu une perte de ressources financières et une précarisation de ces communautés. Concernant PASCO, toutes nos activités nocturnes ont eu lieu en journée avec pour conséquence une réduction de l’utilisation de nos services. Nous avons fait en sorte d’adapter nos activités de terrain en tenant compte de cette nouvelle réalité sanitaire tout en respectant scrupuleusement les gestes barrières.

Selon Michel Lay Mayamba, plusieurs obstacles doivent encore être levés pour améliorer l’accès aux services de santé des personnes transgenres et des HSH. Des actions de plaidoyer ont lieu actuellement en RDC auprès des responsables politiques et des autorités administratives à différents niveaux. Ces initiatives ont pour objectif une meilleure acceptation des LGBT par celles·ceux qui continuent à les rejeter.

Solsoc est une ONG de coopération au développement. Avec des organisations du Sud, elle combat l’exclusion et les inégalités en Bolivie, au Burkina Faso, au Burundi, en Colombie, au Maroc, en Palestine, au Sénégal et en République Démocratique du Congo, ainsi qu’en Belgique. Leur objectif commun est de contribuer à la construction d’un monde plus juste et plus démocratique. Vous souhaitez poser un acte militant en faveur des actions de Solsoc ? Faites un don sur le compte BE52 0000 0000 5454 Plus d’infos : www.solsoc.be

[1] Nous utilisons le terme LGBT et pas LGBTQIA+ dans cet article car les sources citées pour en alimenter son contenu font uniquement allusion à la communauté LGBT.

[2] PASCO (Parlons Sida aux Communautaires) est une organisation non gouvernementale créée en 2003 par le psychologue Michel Lay Mayamba. PASCO intervient dans le domaine de la santé, de la lutte contre le VIH/Sida, les IST et la tuberculose, ainsi que dans ceux de l’éducation et de la lutte contre la pauvreté. PASCO mène des actions dans 9 provinces sur 24 en RDC. Les interventions de l’ONG dans les domaines de la lutte contre le VIH et la tuberculose ciblent le milieu scolaire et les populations clés, dont les travailleuses·eurs du sexe, les HSH (hommes ayant des rapports sexuels avec les hommes) et les personnes transgenres. PASCO a pour partenaires des actrices·teurs belges de la mouvance progressiste tels que les Mutualités socialistes, les Femmes Prévoyantes Socialistes et la FGTB.

[3] Le sigle HSH « désigne tous les hommes qui ont des rapports sexuels avec d’autres hommes, sans tenir compte du fait qu’ils se reconnaissent comme hétérosexuels, bisexuels ou homosexuels » (Source : Sidaction)

Autrice
AutriceSolsoc