La solidarité est le concept à l’origine même de la sécurité sociale et notamment des mutualités. L’idée de base est que, par le biais de cotisations, les membres épargnent collectivement pour s’assurer contre d’éventuels risques individuels. Si l’entraide fait donc partie intégrante de l’ADN des mutualités, c’est aussi le cas de structures mutualistes, comme les Femmes Prévoyantes Socialistes (FPS) ! Petit voyage dans le temps…

L’histoire des mutualités débute en Belgique au 19e siècle. Le pays est alors en plein essor industriel et les conditions de travail de la classe ouvrière sont particulièrement pénibles, causant de nombreuses maladies et accidents. L’insalubrité des logements et l’alimentation de moindre qualité n’arrangent rien. Les salaires bas empêchent bien souvent de payer des soins de qualité (voire des soins tout court). Or, qui dit maladie ou accident dit arrêt de travail, c’est-à-dire absence de salaire. Partant de ce constat, les premières «  sociétés de secours mutuels  », prémisses des mutualités, voient le jour dans les années 1820. La mise en commun des cotisations permet ainsi d’aider les membres dont une éventuelle difficulté financière limite l’accès aux soins de santé. Seul-e-s les membres pouvaient bénéficier du soutien du «  pot commun  » en cas de besoin. La logique de solidarité est donc ici complétée par celle de la prévoyance, qui implique la prise de dispositions de manière « préventive ». Il faut attendre la fin du 19e siècle pour que deux lois (1894 et 1898) reconnaissent pleinement le rôle de ces structures et leur accordent des subsides publics. Les mutualités deviennent dès lors des organismes sociaux d’assurance. Le secteur mutualiste se structure progressivement en se regroupant par «  piliers  » traditionnels de l’État (chrétien, socialiste, libéral). Cela permet de diversifier l’offre de services, notamment par la création de caisses spécifiques à certaines maladies. À cette époque, l’affiliation était libre et volontaire, mais elle ne donnait généralement droit à l’intervention de l’assurance que pour la/le cotisant-e. En pratique, l’affiliation du chef de famille ne garantissait aucune intervention en cas de maladie de ses enfants ou de son épouse, car le système de droits dérivés n’existait pas encore.

L’origine des FPS

C’est dans ce contexte que diverses caisses d’entraide mutuelle féminines voient le jour. La première à porter le nom de La Femme Prévoyante est créée en 1913, au sein d’une mutualité socialiste locale. Ces structures visent à répondre aux besoins spécifiques relatifs à la santé des femmes, alors particulièrement mise à l’épreuve lors de grossesses peu suivies médicalement ou d’accouchements dans des conditions d’hygiène peu enviables. Pourtant, à l’époque, seule une minorité de femmes était affiliée à une mutualité. Une hypothèse avancée est qu’elles avaient plus tendance à faire primer les besoins immédiats de leur famille plutôt que ceux de la collectivité. Or, pour les grandes figures du socialisme belge de l’époque, l’émancipation de la classe ouvrière n’était possible que si les femmes participaient elles aussi à l’effort collectif de solidarité. C’est pourquoi, en 1922, l’Union nationale des fédérations mutualistes socialistes décide de créer un secrétariat spécifiquement chargé de promouvoir le concept de mutualité auprès des femmes belges. Celui-ci s’inspire des expériences de terrain des caisses locales de La Femme Prévoyante et en reprend le nom. Ce secrétariat a pour mission première de défendre le droit à la santé des femmes et d’assurer la protection des mères et de leurs enfants via un système de couverture sociale efficace. De manière plus générale, il dresse également des revendications visant à défendre les droits des femmes en tant que citoyennes. Mise en place d’épargnes prénuptiales, d’aide-ménagères en cas de maladie ou d’hospitalisation, organisation de consultations prénatales ou conjugales, ouverture de centres de vacances, de crèches, de centres de planning familial, publication d’une revue La Famille Prévoyante (ancêtre du Femmes Plurielles qui est entre vos mains), etc. Les actions menées par les FPS ne cessent de se diversifier, mais partagent toutes le même objectif  : lutter pour plus d’égalité et de solidarité dans notre société. De caisse d’entraide mutuelle, les FPS sont devenues un mouvement d’éducation permanente. Si les missions de l’association ont évolué depuis sa création, la défense de la sécurité sociale et la volonté de réaffirmer la place des femmes dans notre société restent partie intégrante de son ADN. Et sont malheureusement toujours autant d’actualité qu’en 1922…

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Fanny ColardAutrice