Nos équipes ont rencontré Fanny Dubois, nouvelle présidente de Soralia.
Peux-tu nous expliquer qui tu es, ton parcours ?
Mon parcours a débuté par des études de sociologie et j’ai parallèlement travaillé comme aide-soignante. Le care est un choix personnel, je souhaitais découvrir la pratique du soin à l’autre. J’ai pu ainsi allier des savoirs théoriques au travers de mes études et des savoirs du terrain en travaillant en première ligne du soin. On peut qualifier le métier d’aide-soignante de difficile, marqué par les injustices basées sur le genre et la classe sociale. Cette expérience vécue depuis le bas de la hiérarchie hospitalière, elle vous marque pour toute l’existence. Elle m’a amenée à vouloir continuer mon investissement professionnel dans le monde soignant avec une approche favorisant la justice sociale, la multidisciplinarité et plaçant la·le patient·e au cœur de sa santé. Le secteur des maisons médicales m’est apparu presque comme une évidence, je m’y suis retrouvée dans les valeurs, les missions et les enjeux défendus. J’ai souhaité y mettre toute mon énergie en qualité de Secrétaire Générale.
Qu’est-ce qui a motivé ton choix à prendre la Présidence de Soralia ? Et que souhaites-tu incarner au travers de ce mandat ?
Prendre la présidence de Soralia s’inscrit dans la continuité de mon parcours. Soralia défend au quotidien des valeurs et des enjeux qui me sont chers : la militance, la démocratie, la justice sociale, l’égalité entre les femmes et les hommes… En qualité de présidente, mon objectif est de pouvoir être force de démocratie participative au sein du Mouvement. J’ai à cœur de rencontrer la base, les militantes du Mouvement afin de renforcer les espaces de parole de ces dernières. Par mon mandat, je souhaite m’inscrire également dans une approche progressiste afin d’éviter la « bureaucratisation » de mon rôle et de l’institution. Et enfin, je souhaite aussi être force de « nouvelles alliances » au travers, notamment, de ma casquette pluraliste au sein des Maisons Médicales. Dans le contexte politique actuel, il est prioritaire selon moi de créer de nouvelles convergences dans le respect de l’histoire et des différences de chaque structure.
Quels vont être tes chantiers prioritaires dans les mois à venir ?
Dans un premier temps, je vais surtout m’approprier et observer l’environnement Soralia, car c’est nouveau pour moi. J’apporterai, évidemment, dans un second temps ma touche : des relais, des expériences, des connexions avec les lieux dans lesquels je siège. Je souhaite être force de convergence et d’ouverture vers d’autres horizons. J’ai conscience que le contexte actuel va amener Soralia à faire face à des périodes parfois difficiles sur le plan politique. D’où la nécessite de faire alliance et de développer des stratégies communes. J’ai à souhait également d’être proche des travailleuses et des militantes, ce qui implique des rencontres de terrain, de l’écoute.
Quels sont, selon toi, les enjeux prioritaires pour notre Mouvement ?
J’identifie trois enjeux d’actualité : Je pense que nous devons être attentives aux métiers du care qui sont particulièrement féminisés. Les dernières réformes tendent à les fractionner, ce qui fragilise leur pouvoir d’action dans le système de santé. Ces métiers sont pourtant essentiels au bon fonctionnement de notre société, mais ils sont encore aujourd’hui gouvernés majoritairement par des hommes, dans une approche néolibérale et trop médicalisée des soins de santé.
Je suis également convaincue que nous devons investir une approche parfois plus radicale de la militance afin de bousculer les institutions en ce y compris la nôtre. Pour moi, la complémentarité des militances est importante. Je pense qu’il faut prendre de l’énergie à faire en sorte que ces deux collectifs féministes se parlent et convergent. Enfin, je pense que nous devons continuer, plus que jamais, à défendre notre modèle de sécurité sociale. Mon parcours m’a amenée à travailler en profondeur ce sujet, j’ai confiance dans mon expertise idéologique en la matière. Or, le futur gouvernement fédéral menace fortement la pérennité des droits acquis liés à la Sécurité sociale avec tous les impacts, directs sur les conditions de vie des femmes que cela pourrait entrainer.
Et enfin, pour terminer, si tu pouvais être une personnalité marquante de l’histoire des droits des femmes, qui serais-tu ?
C’est Hannah Arendt qui me vient à l’esprit. Cette philosophe a écrit sur les origines du totalitarisme au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Elle a tenté de comprendre comment un régime totalitaire peut se banaliser au point de devenir populaire et s’immiscer dans la culture ambiante de la société. La montée de l’extrême droite partout dans le monde m’inquiète notamment dans les retours en arrière qu’elle risque de provoquer pour les droits des femmes. Relire Arendt pour mieux comprendre comment ces phénomènes de banalisation des pensées droitières et xénophobes se produisent dans la société entière me semble particulièrement opportun.