Cette année, les citoyen·ne·s belges en âge de voter se rendent aux urnes pour exprimer leur voix. Cet acte n’est pas anodin, il est l’un des socles sur lequel repose notre société démocratique moderne. Pourtant essentiel, ce régime politique est de plus en plus décrié au sein de la population. Mais que nous dit cette défiance grandissante ? Quelles sont les pistes pour redorer le blason de la démocratie et donner envie aux citoyen·ne·s de le défendre ?

Qu’est-ce que la démocratie ?

Le mot démocratie nous vient du grec ancien, dèmos, qui signifie peuple, population et kratos, qui signifie pouvoir, autorité. La démocratie est donc un système dans lequel le pouvoir politique est détenu par le peuple (principe de souveraineté), c’est-à-dire par l’ensemble des citoyen·ne·s, égales·aux devant la loi (principe d’égalité).

La démocratie se distingue d’autres types de régimes tels que le totalitarisme, l’autoritarisme ou la monarchie absolue. « The Economist » (groupe média britannique), qui réalise chaque année un indice de la démocratie dans 167 pays, indique que moins de la moitié de la population mondiale a vécu en démocratie en 2022 et seulement 8 % dans une « démocratie complète ». La Belgique, 36e de ce classement, y est considérée comme une « démocratie imparfaite ».

Une démocratie peut se décliner sous plusieurs formes : la démocratie directe (le pouvoir est exercé directement par les citoyen·ne·s, sans intermédiaires), la démocratie représentative (les citoyen·ne·s élisent des représentant·e·s) ou la démocratie participative (les citoyen·ne·s sont associé·e·s aux décisions prises par les représentant·e·s élues). À l’heure actuelle, tous les États démocratiques, dont la Belgique, sont des démocraties dites représentatives. Mais celles-ci sont parfois complétées par des mécanismes de démocratie directe et/ou participative, comme c’est le cas en Suisse.

Critiques et réflexions sur l’état de notre démocratie 

Aujourd’hui, ce n’est pas l’idéal démocratique en tant que tel qui est soumis aux critiques mais bien son caractère représentatif. Toute société évolue, or, notre façon de « faire démocratie » stagne. Plusieurs éléments posent problème. Tout d’abord, les profils des élu·e·s, qui manquent de diversité, qui se répètent. Les citoyen·ne·s peinent à se sentir réellement représenté·e·s. Ensuite, les liens ambigus entre le pouvoir exécutif (le Gouvernement) et le pouvoir législatif (le Parlement). Les député·e·s sont de plus en plus dépossédé·e·s de leur pouvoir d’action, au profit de coalitions contraignantes et de Ministres qui sont de plus en plus à l’initiative de projets de loi.

En réalité, le système en lui-même peine à se remettre en question et à se confronter à ses propres limites. La pauvreté grandissante, la crise écologique ou encore l’absence de politique d’accueil migratoire décente sont le reflet de cette incapacité à trouver des solutions à des problèmes pourtant fondamentaux et dénoncés depuis des décennies. De plus, rien ne contraint les élu·e·s ni à respecter la volonté générale de leurs électrices·teurs ni à adopter une attitude irréprochable.

Enfin, certains groupes d’influence, tels que les lobbys et les réseaux sociaux, occupent aujourd’hui une place considérable dans la sphère publique. Ceux-ci cherchent à modifier l’opinion mais aussi à orienter les décisions prises au niveau européen, en usant parfois de méthodes immorales. Or, une société démocratique saine ne peut être ensevelie sous les pressions opaques de représentant·e·s d’intérêts particuliers (d’autant plus lorsque ceux-ci s’avèrent néfastes pour notre planète…).

Quelques pistes pour réenchanter notre démocratie 

La démocratie, pour subsister, se doit d’être en constante évolution et de s’inspirer de dispositifs d’hier et d’aujourd’hui, d’ici et d’ailleurs. Son effectivité repose à la fois sur son adéquation avec le monde actuel et les défis auxquels les citoyen·ne·s sont confronté·e·s, mais aussi sur le degré de confiance qu’elles·ils lui accordent.

C’est pourquoi le modèle démocratique doit aujourd’hui se réinventer. Au regard des critiques formulées ci-dessus, plusieurs pistes se dessinent. Celles-ci amènent, en partie, à des considérations techniques, qui relèvent d’une modification de nos institutions et de leurs fonctionnements. Voici une série de propositions :

  • Le renouvellement plus fréquent des représentant·e·s (limitation du nombre de mandats successifs d’une même fonction, respect strict du non-cumul de mandats, rotation en fonction des projets, introduction de quotas de représentativité, etc. Cette proposition n’implique pas nécessairement la multiplication d’un processus électoral) ;
  • La possibilité, pour les citoyen·ne·s, de réclamer la démission des élu·e·s au cours de leur mandat, selon certains critères prédéfinis ;
  • La lutte contre la corruption et les conflits d’intérêt (règles de financement des partis stricts, renforcement du rôle de député·e, etc.) ;
  • La modification du mode de scrutin (prise en compte du vote blanc, renforcement du poids du vote, etc.) ;
  • L’obligation de transparence des lobbys ;
  • Le financement des corps intermédiaires (Mutuelles, syndicats, structures associatives, ONG, etc.) ;
  • La mise en place de processus de participation citoyenne : tirage au sort, référendum, commissions mixtes, consultation populaire, etc.

Aujourd’hui, les initiatives fleurissent de toutes parts et nos dirigeant·e·s politiques disposent de beaucoup de cartes en main, qu’il sera bon d’activer de manière prioritaire lors des prochaines législatures. Car si la démocratie est imparfaite, elle reste toujours fondamentalement le système le plus égalitaire et le plus respectueux des droits humains expérimenté à ce jour. Et c’est parce qu’il est impératif de la défendre qu’il est nécessaire de la questionner pour la réenchanter, toutes et tous ensemble.

Auteur
AuteurFlorence Vierendeel