Au cœur de notre travail en tant que Mouvement d’éducation permanente se loge la notion de citoyenneté. En effet, soutenir nos publics à participer de manière active et critique à la vie en société et développer leurs capacités d’analyse et d’actions est l’une de nos priorités. Mais que cela recouvre-t-il ? Comment y parvenons-nous sur le terrain ?  

De manière commune, l’espace public désigne, dans une société, l’ensemble des lieux accessibles, à priori, à tout·e·s et à tout moment. La défi nition que nous adoptons est toutefois plus large et s’inspire de la philosophie politique. Bien plus que des endroits de passage et de rassemblement, l’espace public évoque aussi « le lieu du débat politique, de la confrontation des opinions […], mais aussi une pratique démocratique, une forme de communication, de circulation des divers points de vue » .

Or, cet espace est, aujourd’hui, encore trop souvent pensé « par et pour les hommes ». Tant l’aménagement du territoire que l’organisation des espaces de discussions et de prises de décision, qu’ils soient virtuels ou non, ne prennent que rarement en compte les femmes. Cela contribue donc à la perpétuation des stéréotypes de genre, associant principalement les hommes à l’espace public et confi nant ainsi les femmes à l’espace domestique.

Des grands débats de société qui nécessitent une lecture genrée

Il est pourtant essentiel que les femmes de tous milieux et de toute origine puissent s’investir dans cette sphère publique puisque s’y joue toute une série d’enjeux qui les concernent au premier plan. Afin de favoriser cette mobilisation, il convient à la fois de modifier la société en elle-même, à travers, par exemple, un travail d’interpellations politiques, mais aussi de former les citoyen·ne·s aux grands débats de société actuels.

Parmi les axes que nous abordons avec nos publics, citons la défense de la Sécurité sociale, combat mutualiste qui nous anime depuis notre naissance. S’y adjoint de nombreuses questions socio-économiques qui impactent directement les femmes dans leur quotidien telles que l’individualisation des droits sociaux, l’organisation du travail (non-) rémunéré ou encore le régime des pensions. Face à ces thématiques parfois complexes, l’information et la sensibilisation sont une première étape, vers, dans un second temps, l’identification de pistes de solution collectives, comme la justice fiscale.

NOTRE VISION À LA LOUPE

Permettre aux femmes d’être actrices à part entière dans les domaines politiques, sociaux, culturels, médiatiques et économiques qui sont les nôtres sous-tend chacune de nos actions. Outiller la population aux enjeux électoraux, promouvoir la parité à l’échelle globale, éveiller les consciences sur les solidarités internationales, informer sur les mécanismes de la protection sociale ou encore créer des espaces sécurisés de prises de paroles en collectivité sont autant de manières, pour nous, de permettre à nos publics de se construire une analyse critique des réalités de la société. Cela a notamment pour conséquence de susciter l’envie d’un « faire ensemble » et de traduire ces prises de conscience en actions citoyennes concrètes.

Sur le terrain

Encourager la participation des femmes en politique La représentation des femmes en politique est une question de société importante. En effet, pas de démocratie sans parité ! Pourtant, les obstacles à l’entrée des femmes en politique sont encore nombreux… même si certaines de ces femmes en action tracent aujourd’hui un chemin inspirant et porteur d’espoir pour les suivantes. C’est le cas de Nawal Ben Hamou, secrétaire d’État au niveau de la Région de Bruxelles-Capitale.

« En 2014, j’ai eu la chance d’être élue députée fédérale à 26 ans. Ces 5 ans au Parlement m’ont appris énormément. Je me suis aussi rendu compte qu’en Belgique nous avions encore du chemin à faire pour atteindre l’égalité entre les hommes et les femmes — mais aussi l’égalité des chances en général — que ce soit sur le marché du travail, en matière de santé, de logement, de loisirs aussi. Cette chance, elle m’a été donnée en juillet 2019 : j’ai été nommée secrétaire d’État à l’Égalité des Chances et au Logement, au sein du gouvernement bruxellois. C’était une énorme responsabilité pour moi qui viens d’un milieu plutôt modeste et qui n’avais pas fait d’études supérieures. Mais c’était une immense fierté aussi de pouvoir ouvrir ce chemin pour d’autres qui ont le même parcours que moi, mais qui n’osent peut-être pas encore se lancer. Mon parcours démontre que c’est possible, que chacun·e d’entre nous peut y arriver. »

Pour encourager la participation de toutes les femmes dans ce milieu longtemps réservé aux hommes, Soralia organise, depuis plusieurs années, des formations politiques destinées aux citoyennes qui souhaitent faire entendre leur voix sur la scène publique. Des modules qui ont notamment été suivis par plusieurs femmes aujourd’hui échevines dans des communes bruxelloises, telles que Françoise Père, Véronique Levieux, Houria Ouberri ou encore Habibe Duraki.

L’EMPLOI ET LA FORMATION DE NOS PUBLICS COMME VECTEUR D’EMANCIPATION

L’émancipation des femmes de manière générale et, notamment, l’inclusion et l’insertion de tou·te·s dans la société à travers l’emploi et la formation, participent pleinement à la mise en application de nos objectifs de citoyenneté active. Pour y parvenir, notre Mouvement a développé un panel diversifié de services et d’outils, tels que :

  • Les écoles de promotion sociale Soralia qui proposent un enseignement accessible à tou·te·s, hommes et femmes de cultures différentes, désirant réactualiser ou approfondir leurs connaissances, réorienter leurs carrières professionnelles, se perfectionner, se donner de meilleures chances de trouver un emploi ou encore pratiquer des activités favorisant leur épanouissement personnel.
  • Briques à job qui est un jeu coopératif dont l’ambition est de faciliter l’accès aux informations en lien avec le travail, notamment la législation, tout en s’amusant. Bien plus qu’un jeu, c’est un outil efficace qui permet d’identifier les discriminations auxquelles font face tou·te·s les travailleuses·eurs (avec ou sans emploi), de renforcer les capacités d’action collective et individuelle et de réfléchir aux moyens d’en venir à bout. Pas à pas, brique après brique, construire des voies d’émancipation.
  • Déclic Emploi qui est l’un de nos Centre d’Insertion Socioprofessionnel (CISP) situé dans la région de Mons Wallonie Picarde. Ce CISP fête cette année ses 30 ans ! Les formations qui y sont proposées sont multiples  : vente, logistique, employé·e·s administrative·if, néerlandais oral, bilan d’orientation professionnelle, initiation à l’informatique… et s’adressent principalement à des demandeuses·eurs d’emploi faiblement scolarisé·e·s ou ayant une période d’inactivité importante.

SE RÉUNIR POUR S’EXPRIMER EN COLLECTIVITÉ

Nos régionales s’illustrent particulièrement dans l’organisation d’animations : ateliers de théâtre ou d’informatique, création de potagers collectifs… ces lieux sont l’occasion de réfléchir ensemble, de déconstruire les stéréotypes de genre et de s’organiser pour lutter ensemble vers plus d’égalité entre les femmes et les hommes. Parfois, ces groupes se consolident sur le long terme, à travers des projets innovants et fédérateurs, tels que la création de la Maison des Femmes ou encore de la troupe des « Sans poids ni loi ».

La troupe des « Sans poids ni loi », ce sont des femmes et un homme qui n’ont pas leur langue dans leur poche. Elles·il se sont rencontrées en 2007 lors d’une animation sur l’image des femmes dans les médias et la confiance en soi. Elles·il ont décidé de s’exprimer via le théâtre action, encadrées par les FPS du Centre et de Soignies et le Théâtre du Copion. Elles ont ainsi créé 4 spectacles. Aujourd’hui, le 5e est en préparation pour novembre 2022 : « Le 8e  péché » sur l’influence des péchés capitaux sur la vie des femmes à l’heure actuelle.

La Maison des Femmes d’ici et d’ailleurs est une initiative née à la demande de femmes à la recherche d’un lieu de rencontres et d’échanges situé à Liège. L’espace est ouvert aux femmes de tout horizon et de tout âge. Il s’agit avant tout d’un lieu collectif interculturel qui vise l’empowerment des femmes au travers de nos ateliers de français et d’informatique. S’y développent également avec les femmes des projets permettant d’investir l’espace public (apprentissage du vélo, parcours d’orientation dans la ville, sorties cinéma, etc.). Certaines d’entre elles slament, chantent et jouent face à un public. Elles occupent ainsi une place visible dans l’espace public.

Auteur
AuteurJean-Michel Vandergoten
Chargé de communication Soralia Bruxelles