Femmes Plurielles s’est penché sur la place des femmes cyclistes dans l’espace public. Mets ton casque, enfourche ta selle et c’est parti!

Dans le passé déjà, le vélo a pleinement participé à l’émancipation des femmes. Les suffragettes, qui militent pour le droit de vote des femmes, l’emploient pour se rendre à leurs réunions et aux actions qu’elles organisent. Elles ouvrent ainsi la voie aux autres femmes qui peuvent alors quitter leur foyer, décider où et quand elles se déplacent, en toute autonomie.

Aujourd’hui encore, le vélo est un moyen de déplacement démocratique : « Nous sommes les habitantes des villes opprimées et fauchées, c’est notre seul moyen de transport » , confirment les O.V.A.S Psycos, un groupe de cyclistes latinas qui revendiquent leur place dans l’espace public de Los Angeles.

En plus d’être un bel outil d’indépendance, c’est également pour certaines la possibilité de diminuer le sentiment d’insécurité que l’on peut ressentir en tant que femmes dans l’espace public ; et une manière d’éviter les situations de harcèlement ou d’agression et d’y échapper plus rapidement : « On n’est pas à l’abri des remarques sexistes, mais on est aussi plus aptes à s’en éloigner rapidement » . Malgré cela, le cycling gender gap — le nom donné pour illustrer cet écart flagrant entre la pratique du vélo chez les femmes et chez les hommes — reste important : chez nous, les femmes [1] représentent 36,1 % des cyclistes seulement . Outre le sentiment d’insécurité, on note des différences dans les types de trajet effectués par les femmes et les hommes : « Leur mobilité privilégie la proximité, par des trajets plus courts, mais est composée de trajets plus nombreux et plus complexes »  démontre l’étude des FPS Femmes et transports en commun, des parcours de combattantes ? Multiplier les arrêts, accompagnées d’enfants parfois, pousse certaines femmes à préférer un autre moyen de transport. Pour d’autres, c’est justement l’occasion de se faciliter la vie : plus d’embouteillage, de problème de correspondance ou de difficulté pour se garer.

Autre différence notable : la question du choix des vêtements. D’une part, les normes esthétiques contraignent les femmes à rester féminines tout en faisant un effort physique. D’autre part, certaines femmes, si elles respectent les codes vestimentaires féminins, voient augmenter leur sentiment d’insécurité dans l’espace public et leur crainte de se faire insulter ou agresser. Un vrai casse-tête qui condamne parfois des femmes à abandonner le vélo !

Enfin, on constate une prise de risque différente entre les femmes et les hommes au sein du trafic. « On apprend aux femmes qu’elles doivent se protéger et que beaucoup de personnes dépendent d’elles. […] Elles ont donc une conscience différente du risque»  constate Catherine Whitzman. Le trafic largement dominé par les voitures engendre une peur d’être renversée ce qui fait renoncer 54 % d’entre elles à sortir le vélo, indique l’étude de Pro Vélo  .

Pour que les femmes se sentent légitimes et à l’aise à vélo, de nombreuses initiatives existent. Des ateliers vélo en mixité choisie, des marrainages, des clubs de vélo amateurs ou professionnels pour femmes ou encore des rides — parcours à vélo engagés et puissants — comme ceux proposés par Les Déchainé·es à Bruxelles. Leur fanzine traduit l’ambiance des rassemblements : « Les rides militantes permettent de vivre ces moments engagés de façon collective et joyeuse […], renouvelant tout autant nos énergies personnelles que notre envie de lutter ensemble. […] La puissance effervescente qui se dégage du cortège [vient] nourrir nos courages et abolir nos peurs le temps de quelques heures. […] Alors, vous attendez quoi pour venir rouler avec nous sur le patriarcat ? »

Pour aller plus loin :

[1] Par « femmes », et ce tout au long du texte, nous entendons toute personne qui se reconnaît en tant que femme.

Mathilde LargepretAutrice