Le Fonds Monétaire International (FMI) a établi que les profits des entreprises sont la cause principale de l’inflation en Europe. L’organisme international, qui est pourtant le fer de lance du néolibéralisme, a incité les entreprises à modérer leur appétit et à «accepter une part de profit plus faible». Cela indique à quel point la situation est grave.
En effet, le FMI montre que les problèmes d’approvisionnement liés à la pandémie de Covid-19 et à la guerre en Ukraine ont été largement résolus. Les tarifs devraient donc baisser… sauf que, profitant du contexte, les entreprises ont continué à augmenter leurs prix.
Malgré ces recommandations, les économistes libéraux et les responsables des banques centrales accusent les salaires « trop élevés » de provoquer l’inflation . Ainsi, Larry Summers, économiste en chef de la Banque mondiale, a préconisé d’augmenter le taux de chômage pour faire baisser l’inflation .
En réponse, la Banque centrale européenne (BCE) et la Réserve fédérale américaine (FED) ont augmenté les taux d’intérêt de manière agressive, et à une vitesse jamais vue depuis le choc Volcker des années 1980 [1].
L’inflation a été faussement attribuée aux travailleuses·eurs par l’Union européenne et les États-Unis, qui ont négligé la façon dont les entreprises ont exploité une période d’incertitude pour faire des profits. Or, ces derniers « ont atteint des niveaux jamais vus depuis l’après-guerre » .
L’augmentation des prix a concerné principalement l’énergie et l’alimentation — c’est-à-dire deux domaines essentiels.
Contrairement à ce qui a été annoncé, il n’y a pas eu de pénurie de gaz ou de pétrole. Pourtant, les prix ont grimpé en flèche car les marchés financiers ont été manipulés à la hausse et parce que les entreprises ont également gonflé les prix. Ainsi en Belgique, l’énergie a augmenté de 58 % en 2022 (et le gaz de 109 %) ! [2]
En ce qui concerne l’alimentation, les entreprises ont également profité du contexte pour augmenter leurs prix. Ainsi, l’inflation en Belgique a été de 10% en 2022 et de 3% en 2023, mais le prix des aliments a beaucoup plus augmenté pour atteindre 20 % en mars 2023, ce qui est le taux le plus élevé depuis plus de trente ans. [3]
La guerre en Ukraine et la pandémie de Covid-19 ne sont pas seules en cause : l’Organisation des Nations unies pour l’agriculture et l’alimentation (FAO) fait état d’une grande volatilité des prix depuis la crise des subprimes en 2008, avec des baisses et des augmentations du prix des aliments de plus de 50 %.
Actuellement, 10 % des Belges se trouvent en situation de privation matérielle et sociale [4]. L’inflation du prix des aliments est d’autant plus dramatique que ce sont les produits les moins chers qui ont le plus augmenté. En conséquence, le volume des ventes alimentaires a baissé de 4 % [5], ce qui signifie que les familles les plus pauvres ne mangent pas à leur faim. Les mères célibataires et leurs enfants sont particulièrement touchés par cette politique.
Mais rassurez-vous, les profits se portent bien…
[1] Suite aux chocs pétroliers des années 1970, Paul Volcker, directeur de la FED, a appliqué une politique monétaire radicale pour faire baisser l’inflation. Il s’en est suivi une forte hausse du chômage aux États-Unis et une augmentation importante de la dette publique dans le reste du monde (liée à l’augmentation des taux d’intérêt), qui a conduit à une augmentation massive de la pauvreté.
[2] En effet, les sanctions contre la Russie ont été largement détournées, notamment par le fait que les pays occidentaux achetaient les produits russes via des intermédiaires, notamment indiens
[3] Mais ces chiffres sont peu fiables car l’année est encore en cours. Voir : BUREAU FÉDÉRAL DU PLAN, Indice des prix à la consommation, prévision d’inflation, 6 juin 2023
[4] STATBEL, Indice des prix à la consommation harmonisé – mars 2023, Statbel, office belge des statistiques.
[5] FAO, Indice FAO des prix des produits alimentaires, Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, 2023.
[6] STATBEL, Privatisation matérielle et sociale, Statbel office belge des statistiques, 2 février 2023