Le nombre de sportive·ifs en situation de handicap a bien augmenté au sein de la compétition paralympique. Aux Jeux paralympiques de Paris 2024, se trouveront pas moins de 4400 athlètes[1]. Mais quelle représentation en fait-on ?
Pourquoi la non-mixité dans le sport ?
Les Jeux paralympiques ne mettent en lumière qu’une petite partie de toute la diversité des handicaps et des obstacles auxquels il est parfois difficile de s’identifier.
La performance physique des athlètes en situation de handicap peut entraîner, pour les personnes non-sportives mais atteintes du même handicap, un renforcement du validisme [2]. Certains individus valides se demanderont pourquoi telle personne n’arrive pas à la même performance alors qu’elle a un handicap similaire. Elle sera suspectée d’être fainéante ou de manquer de courage. « Place, majoritairement, à celle et celui qui est susceptible de surprendre et de séduire par sa capacité à surmonter des épreuves de la vie, par ses performances, son apparence, un corps qui peut faire miroir à l’imaginaire du corps construit par une idéologie sportive très prégnante : un corps contrôlé, toujours plus efficace […], capable d’une figuration athlétique, voire héroïque ».
Une représentation conforme aux normes de la validité
Le validisme s’exprime par la manière dont sont représentés les athlètes en situation de handicap. Le sociologue Pierre Dufour, lui-même en fauteuil roulant, s’interroge sur l’image que les Jeux paralympiques renvoient de ces personnes et sur ses conséquences : « Quelles représentations en fait-on ? Celles de jeunes gens beaux et dynamiques. Celles de muscles triomphants. Finalement celles de sportifs qui se coulent dans les normes de la validité. C’est leur choix et il est tout à fait respectable. Mais cette réalité reste quand même très éloignée de celle que vivent de très nombreuses personnes handicapées : le corps bancal qui perd en capacité, l’inaccessibilité, l’insuffisance des moyens de compensation… ».
De nombreuses personnes en situation de handicap ne se reconnaissent donc pas dans ces représentations médiatiques, tellement elles se sentent éloignées de ces « superhéroïnes » et « superhéros ». Celles-ci et ceux-ci promeuvent le dépassement de soi et incarnent cette « leçon de vie », cette ténacité, ce mérite et cette résilience face à l’adversité. Et c’est ce qu’attend le grand public envers les personnes en situation de handicap : de l’inspiration. C’est d’ailleurs ce que l’on appelle l’inspiration porn : l’usage du handicap au profit du bien-être des personnes valides.
Des choix politiques au détriment du sport de loisirs
Rappelons simplement que derrière les exploits des sportives·ifs en situation de handicap, il y a un travail d’accompagnement professionnel, une logistique, mais également des choix politiques. Le fait que les athlètes qui obtiennent les meilleurs résultats viennent de « pays développés » [3] depuis des décennies n’est d’ailleurs pas anodin… Pays qui, selon leurs orientations et choix politiques, ont investi dans le parasport d’élite au détriment de la pratique pour toutes et tous, du sport pour le plaisir et comme facteur déterminant de la santé. Le gouvernement et les politiques publiques ont donc une responsabilité importante dans le développement du parasport et du sport de loisir, en dehors des JO !
[1] La parité clamée par les Jeux de Paris ne s’appliquera pas aux Jeux paralympiques et tous les handicaps ne sont pas représentés. Pour en savoir plus.
[2] Le validisme est un modèle de société où les personnes valides sont associées à la normalité. Celles qui ne le sont pas, notamment en raison d’un handicap, sont marginalisées et discriminées.
[3] Les huit pays qui ont remporté le plus de médailles aux Jeux paralympiques entre 1960 et 2016 : États-Unis, Grande-Bretagne, Allemagne, Australie, Canada, Chine, France et Pays-Bas. Pour en savoir plus.