Les Centres de Planning familial (CPF) des FPS sont des lieux d’accueil où chacun·e peut trouver une aide et un soutien en matière de vie relationnelle, affective et sexuelle. Les professionnel·le·s y réalisent des entrevues en toute confidentialité et dans le respect des convictions de chacun·e. Certains centres des FPS ont développé un service spécifique de prise en charge des victimes de violences conjugales. C’est le cas du CPF de Namur – Réseau Solidaris avec le service Ça vaut pas l’coup. Rencontre avec deux travailleuses de ce service, Lorelei Opdenacker, assistante sociale et Linda Culot, directrice.

Pouvez-vous présenter Ça vaut pas l’coup ?

Le service a été créé en 2004 afin d’offrir de la discrétion aux victimes qui souhaitaient parler de leur vécu. Il a d’abord été mis en place au sein de la structure hospitalière Val de Sambre à Sambreville. Le Centre Violences conjugales  Ça vaut pas l’coup est un service ambulatoire qui propose un accueil, un accompagnement et une orientation aux victimes de violences conjugales de la province de Namur. Notre équipe compte quatre assistantes sociales, une psychologue et une directrice. L’aide proposée par le service est gratuite et s’adresse à toute victime de violences conjugales et/ou son entourage. Le centre a la particularité de pouvoir intervenir à n’importe quel moment de la situation  : avant, pendant ou après des épisodes de violences.  Les équipes se déplacent dans toute la province de Namur et ont des points de contact à Dinant, Philippeville et Namur.

Pourquoi est-ce important qu’un tel service existe ?

Au vu des situations de violences conjugales fréquemment rencontrées au sein du CPF, il nous a semblé important qu’un tel service se mette en place. Il existait des services généralistes ou des maisons d’accueil qui pouvaient accueillir les victimes de violences conjugales mais seulement si elles avaient décidé de quitter leur foyer. Or, la plupart des victimes que nous recevions au CPF n’en avaient pas l’intention. Il nous a donc paru nécessaire d’offrir un service d’accueil et d’accompagnement spécialisé, dans un endroit neutre, où les victimes pourraient se sentir en sécurité et bénéficier d’un suivi même si elles n’avaient pas quitté leur foyer.

Quel type de suivi propose Ça vaut pas l’coup ?

Nous mettons en place un accueil et un suivi social et psychologique. Nous travaillons avec un réseau de partenaires qui rassemble des avocat·e·s, des services d’aide aux victimes, des CPAS, des maisons d’accueil, des services d’aide à l’enfance, etc. Il est important pour nous de pouvoir identifier rapidement des personnes-relais pour assurer une prise en charge complète. Il s’agit, dans beaucoup de situations, d’accompagner physiquement les victimes lors de leurs démarches (par exemple, pour un éventuel dépôt de plainte à la police, chez l’avocat·e, au service d’aide à la jeunesse ou au tribunal). Il est essentiel que les professionnel·le·s soient présent·e·s aux côtés de la victime pendant la majorité du processus car celui-ci est long et éprouvant.

Comment se passe généralement une prise en charge ?

Il est  difficile d’établir un canevas car chaque situation est différente. Cela varie en fonction du parcours de la personne, de sa charge émotionnelle, du fait qu’elle ait des enfants ou non et de l’aide dont elle a besoin. Nous tentons de répondre aux demandes le plus rapidement possible et le plus justement en faisant appel à notre réseau. Certaines victimes souhaitent que la situation soit judiciarisée [1] et d’autres pas. Il est primordial pour nous de respecter le rythme et la demande de la personne. Généralement, le suivi s’étale sur quelques mois voire des années. Il arrive aussi que nous accompagnions des victimes durant plusieurs mois et qu’elles arrêtent soudainement le suivi. Parfois, elles reviennent des années plus tard.

Quelles sont les difficultés majeures rencontrées par les victimes ?

Le manque de ressources financières et le manque de réseau. Elles ont souvent été isolées de leurs proches et n’ont plus personne vers qui se tourner : l’auteur de violences est devenu le pilier de leur vie. S’il y a des enfants, la situation est d’autant plus difficile. Une autre difficulté fréquemment rencontrée est le manque de preuves pour construire un dossier juridique solide, surtout dans le cadre de violences psychologiques. La justice demande des certificats médicaux ainsi que des plaintes. Or, les victimes sont souvent terrorisées par leur conjoint et osent rarement déposer plainte. L’éventualité d’une garde alternée dans le cas où il y a des enfants peut également représenter un frein au dépôt de plainte. En effet, elles craignent de devoir partager la garde des enfants avec l’auteur et que ceux-ci soient instrumentalisés.

Avez-vous constaté une hausse ou une diminution des demandes de prise en charge de violences conjugales durant la crise sanitaire liée au Covid-19 ?

La ligne Écoute Violences Conjugales (0800/30.030) a enregistré une augmentation des appels téléphoniques (à la fois de victimes, de professionnel·le·s et de personnes de l’entourage). Toutefois, nous n’avons pas eu une augmentation importante des nouvelles demandes. Pendant le confinement, les victimes étaient enfermées chez elles avec leur compagnon et leur·s éventuel·s enfant·s, ce qui laissait peu de possibilités pour entamer des démarches extérieures. Ainsi, la plupart des victimes ont plutôt mis en place des mécanismes de protection pour pouvoir tenir durant cette période sensible. Cependant, notre psychologue a été particulièrement sollicitée par les victimes avec lesquelles elle était déjà en contact. L’équipe a aussi été fortement mobilisée pendant la crise sanitaire liée au Covid-19 puisqu’il fallait intervenir rapidement dans des situations d’urgence et garder un contact permanent avec les victimes. Nous avons également collaboré à la mise en place de structures d’hébergement d’urgence. Malheureusement, aujourd’hui, avec le déconfinement, nous observons une augmentation du nombre de nouvelles demandes d’aide.

La Fédération des Centres de Planning familial des FPS (FCPF-FPS) coordonne et promeut 17 Centres de Planning familial en Wallonie et à Bruxelles. Son but est de garantir à tou·te·s un accès égal à l’information et aux services disponibles en matière de vie relationnelle, affective et sexuelle. Reconnue en éducation permanente, la FCPF-FPS réalise également des projets et des publications en lien avec l’EVRAS (Education à la vie relationnelle, affective et sexuelle). Plus d’infos sur la Fédération et ses centres : www.planningsfps.be. Pour les coordonnées de tous les centres en Wallonie et à Bruxelles : www.loveattitude.be.

[1] C’est-à-dire que la justice examine la situation.

Les services dédiés à la prise en charge des victimes de violences conjugales sont présents dans 4 des Centres de Planning familial des FPS :

• À Liège (AlternativeS) : violences. conjugales@arenard.be – 04/248.75.98 ou 04/248.72.20

• À Mons : cpf.315@solidaris.be – 068/84.84.58

• À Tournai : centre@aurorecarlier.be – 068/84.84.59

• À Namur (Ça vaut pas l’coup) : cavautpaslcoup@solidaris.be – 081/77.71.62 Vous pouvez contacter le Centre de Planning familial de votre choix en Wallonie ou à Bruxelles qui vous renverra vers le service adapté : www.loveattitude.be.

Si vous souhaitez plus d’informations sur les violences conjugales, consultez le dossier thématique « Violences conjugales » sur le site internet de la Fédération des Centres de Planning familial des FPS : www.planningsfps.be

Pascaline NuncicAutrice