Soins dentaires impayables, facture à la pharmacie qui explose, pénurie de soignant·e·s… Nos soins de santé sont sous pression. Quand l’industrie pharmaceutique s’en met plein les poches, la Sécurité sociale et les patient·e·s, elles·eux, passent à la caisse [1].

L’industrie pharmaceutique : un secteur fructueux

En 20 ans, les bénéfices de l’industrie pharmaceutique ont augmenté de 265 % pour atteindre plus de 1,4 milliard de dollars en 2021 au niveau mondial. L’industrie pharmaceutique est l’un des secteurs d’activité avec le plus haut taux de profit moyen au niveau mondial. Entre 1954 et 1999, les marges de profit moyen atteignaient presque 12 %. Entre 2000 et 2019, ce taux grimpe jusqu’à presque 18 % de profit. Derrière ces chiffres se cache un secteur économique très fructueux !

Sécurité sociale : l’incontrôlée explosion des prix des médicaments

De l’autre côté, la Sécurité sociale dépense chaque année 5,4 milliards d’euros afin de rembourser les médicaments aux patient·e·s et d’ainsi les rendre accessibles pour tou·te·s. Sans cet outil de répartition des richesses, les médicaments seraient tout simplement impayables pour les citoyen·ne·s. La Sécurité sociale est financée par les travailleuses∙eurs qui, chaque mois, cotisent une partie de leur salaire pour se protéger solidairement des risques de la maladie.

Mais malheureusement, le budget de la Sécurité sociale n’est pas extensible. À l’avenir, il y a un risque que la Sécurité sociale ne puisse plus rembourser les nouveaux médicaments.

Pourquoi ?

En négociant avec l’État des prix en déconnexion totale avec les coûts de recherches et de production des médicaments, les firmes pharmaceutiques parviennent à nous imposer des prix ahurissants. Chaque année, ces prix augmentent : pour les traitements délivrés à l’hôpital aux patient·e·s ambulatoires (en hospitalisation de jour), les dépenses explosent de presque 20 % par an .

À titre d’exemple, les traitements pour le cancer, qui représentent 12 % des dépenses du budget de remboursement des médicaments, nous sont vendus de 16 à 18 fois plus que le « prix juste » calculé par le modèle du fair price de l’Agence Internationale des Mutualités.

Si le modèle du fair price s’appliquait à l’ensemble des médicaments négociés par l’État depuis 2015, la Belgique paierait 4 fois moins pour les médicaments innovants. Chaque année, 1 milliard d’euros, soit 20 % du budget total pour le remboursement des médicaments, pourrait être récupéré auprès de l’industrie pharmaceutique et réinvesti dans les soins de santé.

Autrement dit, chaque année, 1/5ème des dépenses pour le remboursement des médicaments est détourné de son objectif initial de redistribution des richesses en remplissant les poches d’actionnaires nanti∙e∙s plutôt que celles des patient·e·s.

Solidaris en ordre de bataille

« Face à cette opacité et à l’augmentation constante des prix des médicaments, les mutualités ont développé un modèle du juste prix. Il se base sur des critères objectifs prédéfinis intégrant les coûts des fabricants ainsi que des marges raisonnables tout en rémunérant l’innovation liée à la valeur thérapeutique du médicament.

L’objectif du modèle est de trouver le fragile équilibre entre les intérêts divergents des firmes qui développent et commercialisent les médicaments, et des systèmes de santé qui les financent et doivent avoir les moyens de donner accès aux médicaments d’autre part. »

C’est pourquoi la campagne « Le juste prix des médicaments » menée par Solidaris demande que les négociations des prix des médicaments en Belgique se basent sur ce modèle. Une pétition a été lancée pour demander de modifier la loi dans ce sens. En récoltant 25 000 signatures, Solidaris pourra défendre cette proposition au sein de la Commission Santé du Parlement Fédéral.

Plus d’information sur http://lejusteprixdesmedicaments.be

[1] Cet article s’inspire de l’analyse Soldaris : « Quel serait l’impact d’un prix juste pour les médicaments en Belgique ? »

Joachim WatheletAuteur