Beaucoup en ont entendu parler, notamment suite au décès en début d’année de la jeune Maëlle, à 17 ans. Le syndrome du choc toxique (SCT), bien que très rare en général [1] , évolue pourtant de manière rapide en l’absence de traitement et peut même être fatal.

Le syndrome du choc toxique est une maladie infectieuse induite par le staphylocoque doré, une bactérie présente naturellement dans le vagin de 4% des femmes. Lors du port d’un dispositif intra-vaginal durant les règles (tampon, coupe menstruelle…), autrement dit quand le sang stagne et n’est pas rapidement évacué [2], chez certaines de ces femmes, la bactérie trouve un milieu favorable pour se développer et éventuellement produire une toxine (TSST-1) qui en passant dans le sang, peut l’empoisonner. Ce n’est donc pas le tampon ou la coupe menstruelle en tant que tel·le·s qui sont responsables du choc mais bien la toxine produite par une souche de la bactérie dont il faut être porteuse.

Un manque d’informations à destination des femmes…

Les femmes ne sont pas suffisamment informées sur le syndrome du choc toxique. En effet, la plupart ne semblent pas au courant des risques encourus car elles n’ont pas toujours le réflexe de lire la notice d’utilisation des tampons, sur laquelle l’explication est inscrite en petits caractères. D’autres en ont déjà vaguement entendu parler mais sans plus de précisions. En outre, le tabou entretenu autour des règles a pour conséquence que les jeunes filles apprennent finalement par elles-mêmes ou par leurs pairs à utiliser des serviettes, tampons… Au-delà du tabou, il existe également des non-dits concernant l’utilisation de produits menstruels. Par exemple, les tampons ne sont pas considérés comme étant des dispositifs médicaux en Europe, ce qui implique qu’il n’y a pas d’obligation de révéler leur composition ou d’informer clairement sur les possibles risques encourus. Des manquements qui perpétuent les inégalités de traitement en matière de santé, entre femmes et hommes. Ce manque d’informations rappelle une fois de plus l’importance de généraliser l’Éducation à la Vie Relationnelle, Affective et Sexuelle (EVRAS) dès le plus jeune âge. Bénédicte Linard, ministre en charge de la Santé et de l’Enfance en Fédération Wallonie-Bruxelles, souhaite d’ailleurs charger les Services de Promotion de la Santé à l’école de mieux sensibiliser les jeunes filles aux risques du choc toxique et davantage sensibiliser les Centres de Planning familial et les hôpitaux sur la communication de ces risques.

… Et un manque de formation des médecins

Il est cependant frappant de constater que l’entière responsabilité de la survenue de cette infection semble reposer sur les femmes. En effet, diverses recommandations ou alternatives leur sont proposées, signifiant implicitement qu’il ne tient qu’à elles de l’éviter. Or, il s’agit souvent d’une erreur de diagnostic qui retarde les soins et augmente ainsi le risque de décès. Les médecins sont-elles·ils alors suffisamment informé·e·s sur cette infection ? En parallèle du diagnostic, le tabou entourant les règles renforce les mauvaises prises en charge. En effet, c’est un sujet dont on ne parle pas ou peu, ce qui n’encourage pas les médecins à (se) poser des questions en ce sens. De plus, il semble toujours relativement normal que les femmes souffrent en période de règles, minimisant ainsi l’importance de leurs problèmes de santé. Ajoutons que la médecine ne s’empare pas encore suffisamment des questions relatives à la santé des femmes sauf en matière de contrôle de la santé sexuelle et reproductive, ou encore de dépistage de cancer du sein. Paradoxalement, il n’existe que très peu d’avancées sur les traitements relatifs à l’endométriose ou à la prévention du SCT par exemple, car la recherche scientifique ne prend pas en considération l’ampleur du phénomène.

Quelles mesures de prévention ?

Différentes mesures de prévention ont été publiées en France par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES). Parmi elles, citons les principales :

  • Ne pas porter de dispositif intra-vaginal plus de 4 à 8 heures ;
  • Se laver les mains avec du savon avant d’insérer le dispositif et avant de l’enlever ;
  • Pour la coupe menstruelle, la laver à l’aide d’un savon doux et la stériliser si possible le matin et le soir en la plongeant quelques minutes dans de l’eau bouillante ;
  • Utiliser l’absorption qui correspond aux pertes (la plus petite possible) ;
  • Ne pas porter de tampons après ou en dehors des règles ;
  • Privilégier le port de serviettes la nuit.

Notons qu’il n’est pas toujours possible pour les femmes de changer de tampon toutes les 4 heures parce qu’elles n’ont pas forcément accès à un endroit leur permettant de le faire et/ou qu’elles ne disposent pas toujours de tampons en suffisance – les produits menstruels représentant un coût important, particulièrement pour les femmes en situation de précarité. Par ailleurs, pour les jeunes filles, des infrastructures inadaptées ou le manque d’hygiène aux toilettes au sein de leurs établissements scolaires poussent certaines à ne le changer qu’une fois de retour à la maison. Ces problématiques font pleinement partie des missions des politiques qui doivent mener à une réflexion profonde, tant sur l’accessibilité physique aux toilettes dans l’espace public que sur l’accessibilité financière aux produits menstruels à travers des financements et des campagnes de sensibilisation par exemple. À l’instar de l’Écosse qui a récemment rendu les tampons et serviettes gratuit·e·s pour toutes les femmes et de la France qui va, dès septembre, expérimenter la gratuité de produits menstruels pour les femmes précarisés, il est urgent que la Belgique agisse. En effet, seule une étape a été franchie fin 2017 : les coupes menstruelles, tampons et serviettes ont été reconnues comme produits de première nécessité. La TVA sur ces articles est alors passée de 21% à 6%. Un pas en avant qui ne permet toujours pas à bon nombre de femmes de vivre décemment leurs périodes menstruelles [3].

Existe-t-il des alternatives ?

Les alternatives aux tampons et à la coupe menstruelle ne se comptent pas par dizaines. Il existe les serviettes périodiques qui ne sont pas toujours fiables ou confortables en cas de flux abondants. La culotte menstruelle (dans la même idée que les serviettes lavables) a fait son apparition récemment avec des promesses écologiques et saines puisqu’elle est lavable, ultra-absorbante et protégerait surtout du SCT. Cependant, il en faudrait entre 3 et 6 en période de règles et une culotte de bonne qualité coûte entre 30 et 40¤, une somme importante à investir en une fois. Pouvons-nous prétendre à la naissance d’un nouveau produit menstruel 100% sain et fiable ? Pouvons-nous aspirer à une meilleure prise de conscience politique de la santé des femmes ? Et que celle-ci passe, entre autres, par une réflexion sur l’accessibilité sous tous ces aspects, depuis les dispositifs périodiques aux installations sanitaires pour toutes ? Tous les espoirs sont permis !

La Fédération des Centres de Planning familial des FPS (FCPF-FPS) coordonne et promeut 17 Centres de Planning familial en Wallonie et à Bruxelles. Son but est de garantir à tou·te·s un accès égal à l’information et aux services disponibles en matière d’EVRAS (Education à la Vie Relationnelle, Affective et Sexuelle). Reconnue en éducation permanente, la FCPF-FPS réalise également des projets et des publications en lien avec l’EVRAS.

Plus d’infos sur la Fédération et ses centres : www.planningsfps.be. Pour les coordonnées de tous les centres en Wallonie et à Bruxelles : www.loveattitude.be.

[1] Seuls 5 cas sont rapportés en moyenne par an en Belgique.

[2] On parle généralement de port prolongé, au-delà de 4h à 6h

[3] On estime que le budget d’une femme pour les produits menstruels se situe entre 5 et 15€ par mois.

Eléna DioufAutrice