Près de 500 millions de femmes dans le monde n’auraient pas les moyens d’acheter régulièrement des produits périodiques. Ce phénomène touche avant tout les personnes les plus précarisées : les étudiantes [1] les personnes sans domicile fixe ou encore celles vivant sous le seuil de pauvreté.
En Europe, certaines avancées ont vu le jour pour lutter contre la précarité menstruelle. Au Royaume-Uni, la TVA a été supprimée sur les produits périodiques et en Belgique, elle est passée de 21 à 6%, en faisant ainsi des produits considérés comme « de première nécessité ». L’Ecosse a voté la gratuité totale de ces produits, ce qui est une première mondiale ! Malgré ces avancées, de nombreuses personnes dans le monde doivent chaque mois choisir entre produits de première nécessité et produits périodiques qui font partie des soins de santé… Qu’en est-il chez nous ?
Un coût périodique qui n’est pas sans conséquences
S’il n’existe pas d’étude belge officielle, on estime que chaque cycle menstruel reviendrait en moyenne à plus de 10 euros par mois. Ce chiffre peut varier et dépend de nombreux facteurs qu’il est important de prendre en compte : l’achat d’antidouleurs ou d’autres médicaments, le flux de chacune, l’achat de nouveaux sous-vêtements ou de nouveaux draps, les visites médicales ou gynécologiques, le type de protection utilisée, etc. Malheureusement, de nombreuses femmes en situation de précarité doivent faire des choix dans leurs dépenses, et ce sont souvent les soins de santé qui sont délaissés (visites chez les généralistes, les spécialistes, achats de médicaments…). En 2020, près d’un·e Belge sur deux a reporté ou renoncé à un soin de santé en Wallonie ou à Bruxelles et les femmes sont les plus concernées. Ainsi, le report des soins périodiques mais aussi la désinformation et le tabou autour des menstruations ont des répercussions notables sur la santé mentale (honte, culpabilité) et physique (infections, syndrome du choc toxique , maladies gynécologiques non diagnostiquées) mais également dans d’autres domaines de la vie quotidienne : présence au travail, insertion socio-professionnelle, loisirs .
De nombreux facteurs à prendre en compte pour faire changer les choses
Le report de ces soins de santé primordiaux a de grandes conséquences sur la santé des femmes mais d’autres facteurs sont à prendre en compte. Tout d’abord, une réflexion doit être menée sur les infrastructures dans l’espace public et les écoles, pensées par et pour les hommes. Le nombre de toilettes et de points d’eau devraient être augmentés, accessibles et gratuits à n’importe quel moment du jour et de la nuit. Dans les écoles, nombre de jeunes filles préfèrent se retenir d’aller aux toilettes tant les sanitaires sont vétustes, sales ou manquent d’intimité, ce qui mène à des conséquences parfois désastreuses : infections, constipation, troubles de la vessie, etc. Par ailleurs, le manque d’Éducation à la Vie Relationnelle, Affective et Sexuelle (EVRAS) et le manque de sensibilisation perpétuent le tabou toujours trop présent autour des menstruations et surtout le manque d’informations concernant les risques liés aux règles chez les jeunes comme chez les adultes. Il est urgent d’évaluer l’enjeu réel en termes de précarité menstruelle en Belgique au travers d’une étude solide, étape essentielle pour mener une réflexion transversale et pour changer les choses de manière structurelle et pérenne. Il s’agit avant tout d’un enjeu de santé publique et d’égalité des chances !
Des initiatives locales déjà mises en place dans les Centres de Planning Familial des FPS
Les Centres de Planning Familial (CPF) sont des acteurs de première ligne essentiels en ce qui concerne la précarité menstruelle. Plusieurs projets ont donc été mis sur pied ces dernières années, notamment le projet Sang Soucis, à l’initiative des FPS de Liège en collaboration avec les CPF-FPS de Liège, Spa et Verviers, qui récoltent des produits périodiques dans le but de les redistribuer aux personnes dans le besoin. Ce projet est associé notamment à l’initiative liégeoise TakeAway qui distribue des denrées alimentaires et hygiéniques aux étudiant·e·s. Depuis 2016, sur le même principe de récoltes et redistributions, il existe également BruZelle, qui travaille en partenariat avec certains de nos Centres, notamment le CPF Rosa à Bruxelles ou le CPF Willy Peers à Namur. Enfin, le CPF de Namur-Réseau Solidaris et les FPS de Namur mettent actuellement sur pied un nouveau projet. Il s’agit de récoltes de produits périodiques ainsi que la création d’un petit guide d’utilisation pour sensibiliser notamment au syndrome du choc toxique.
Pour plus d’informations sur les Centres de Planning Familial des FPS
[1] Une étude menée en France sur 6500 étudiant·e·s affirme que 13 % des interrogé·e·s déclarent avoir déjà dû choisir entre acheter des protections hygiéniques et un autre produit de première nécessité.