Les règles dans la pratique sportive restent taboues et invisibilisées. Entre les stratégies de camouflage et les répercussions sur la performance sportive, les menstruations sont une source de préoccupation évidente pour de nombreuses·eux athlètes. Pour autant, le cycle menstruel est-il un frein à la pratique ?
Il est vrai que le lien entre menstruations et sport est souvent perçu de manière négative en raison des symptômes associés tels que la douleur et la fatigue qui peuvent constituer des obstacles dans les entrainements. Ce sujet est d’ailleurs de plus en plus abordé par les sportives·ifs. En parallèle, les centres d’études investissent peu à peu ces questions. Elles.ils ont besoin que le sujet soit discuté et pris en compte pour combattre les inégalités dans la pratique sportive.
La judoka Clarisse Agbégnénou, quintuple championne du monde et double championne olympique, l’exprime en ces termes : « Pourquoi s’entrainer dans la douleur si l’on peut faire des choses totalement différentes ? Pourquoi travailler dans la douleur ? C’est bien de pouvoir en parler, de trouver des solutions. J’ai vu qu’en Espagne, ils prévoyaient des heures de repos. Ce sont des choses concrètes ! »
Le male gaze dans le sport
En effet, puisque le travail des athlètes est lié à leurs performances, des aménagements devraient être proposés pour optimaliser leur confort durant les entrainements et les compétitions. Comme ailleurs, l’athlète référent est masculin ; le sport est un domaine principalement pensé par et pour les hommes, ce qui est symptomatique de la sous-représentation des femmes de façon générale. En réalité, les sportives ne critiquent pas leur cycle menstruel, mais soulignent plutôt l’absence de prise en considération de leurs réalités par les clubs et les fédérations sportives. Par exemple, ne plus imposer le port de tenues de couleur blanche constituerait déjà une progression pour la diminution de la charge mentale — la crainte de la tache, entre autres — qui pèse sur les sportives. Le problème n’est donc pas « biologique », mais structurel et institutionnel.
Se faire confiance
À notre échelle, en tant que sportives « amatrices », que peut-on mettre en place pour améliorer notre confort dans nos pratiques sportives ?
Comprendre son cycle menstruel est une piste pour adapter l’entrainement à son propre rythme. En moyenne, le cycle menstruel dure 28 jours et fonctionne en trois phases : folliculaire, ovulation et lutéale. Ces données ne sont qu’indicatives puisque le vécu des cycles —
aménorrhées (l’absence des règles), irrégularités, etc. — varie d’une personne à l’autre. L’observation du cycle menstruel ne représente donc qu’une des nombreuses portes d’entrée pour appréhender le fonctionnement de son corps et ses ressentis.
Par exemple, au moment de la phase folliculaire (jours 1 à 14) l’énergie est au rendez-vous, avec un pic au moment de l’ovulation au milieu du cycle (jour 14). Tandis que la phase lutéale (jour 15 à 28) est une exposition à davantage de fatigue. Chaque phase peut dès lors impacter les performances sportives et les périodes de récupération. Vous êtes les expert·e·s de votre propre corps ! Apprendre à se connaitre, à s’écouter et repérer les périodes de sensibilité permet d’ajuster l’intensité des entrainements en conséquence — ou de ne pas s’entrainer du tout.
Le sport ne devrait jamais être ressenti comme une obligation, nous n’avons pas toutes et tous les mêmes ressources face à l’activité physique — maladies chroniques, équipements sportifs inadaptés, injonction à la minceur, crainte du regard des autres, manque de temps, d’argent, etc. Il est bon de rappeler que ce n’est pas aux individu·e·s de s’adapter aux pratiques sportives et aux infrastructures, mais à ces dernières d’être plus accessibles.
En ce sens, aborder la question des menstruations dans le sport n’est pas une approche limitante pour aborder les inégalités dans le domaine. Finalement, le sujet ne s’adresse pas uniquement aux personnes menstruées. Il permet de repenser le système sportif dans son ensemble et la figure dominante du sportif qu’il valorise et favorise.