Le 17 septembre 2020, le gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles a adopté un plan « Droits des femmes », initié par la ministre en charge de cette matière, Bénédicte Linard (Écolo) . Ce texte fixe les lignes directrices à suivre pour œuvrer à plus d’égalité entre les femmes et les hommes lors du mandat en cours (2020-2024). Partons à la découverte de ce nouvel outil de référence pour les associations féministes.

Un signal positif, dans un esprit de collaboration

Ambitieux, ce nouveau plan s’articule autour de 4 thématiques chères aux combats féministes : la lutte contre les violences, la déconstruction des stéréotypes de genre, une meilleure représentation des femmes dans tous les secteurs professionnels, à tous les niveaux dans les instances de décision et les postes à responsabilités, ainsi que la conciliation entre vie privée et vie professionnelle. Son élaboration a réjoui la société civile [1] puisque près de 178 organisations actives sur les questions relatives aux droits des femmes ont été consultées pour la phase de rédaction . Et, à la lecture de la version finale, nous constatons que de nombreux enjeux pointés par les associations féministes, telles que la nôtre, ont été pris en compte, parmi lesquels le recueil de données statistiques en matière de violences, l’augmentation du taux de couverture des places en crèches, la consolidation de l’Éducation à la Vie Relationnelle Affective et Sexuelle (EVRAS) ou encore la formation des enseignant·e·s et du personnel de l’accueil de la petite enfance à la dimension de genre. Ainsi, comme l’indique Bénédicte Linard, les mesures listées se veulent « précises, mesurables et réalistes ». À cet effet, un comité de suivi, composé tant de membres du gouverne – ment que de la société civile, sera chargé d’évaluer leur mise en œuvre durant ce mandat. Notons que la principale (r)évolution du plan réside dans le fait qu’il concerne l’ensemble des compétences de la Fédération Wallonie-Bruxelles . La dimension de genre est perçue comme étant transversale et s’applique à de nouvelles matières, telles que les médias, la culture ou encore le sport. Le plan semble offrir une transposition concrète au gender mainstreaming qui vise à insuffler un regard genré dans l’ensemble des politiques publiques. Chaque mesure a donc déjà été attitrée à la·au·x ministre·s responsable·s de sa mise en application. Enfin, la volonté d’inscrire ce plan dans une grille de lecture intersectionnelle, reconnaissant l’existence de « femmes qui se situent à la croisée de multiples rapports de domination »  est énoncée et les « femmes » sont envisagées comme catégorie socialement construite, comprenant « les personnes qui s’identifient comme femmes ou assignées femmes » .

Mais la vigilance reste de mise !

Au-delà de ces aspects positifs notables, la société civile demeure prudente. Malgré le financement par la ministre de deux appels à projets, la question des budgets alloués pour garantir la mise en œuvre de l’ensemble du plan reste en suspens. La pérennité des actions entreprises est pourtant essentielle, ainsi que leur ancrage sur le terrain. Plusieurs associations féministes soulignent d’ailleurs l’importance d’être impliquées tant dans la concrétisation que dans l’évaluation sur le long terme des mesures. Mais la plus grande interrogation du secteur reste la concertation entre les différents niveaux de pouvoir, en particulier avec le fédéral, notamment à travers la conférence interministérielle (CIM) droits des femmes [2]. Rappelons que des matières fondamentales, telles que la justice ou encore la lutte contre la précarité, sont entre les mains du nouveau gouvernement dit « Vivaldi ». Or, les droits des femmes n’apparaissent pas en tant que tels au sein de leur accord . La secrétaire d’État à l’Égalité des genres, des chances et à la Diversité, Sarah Schlitz (Écolo), a néanmoins déclaré porter une attention particulière au renforcement de la coordination afin d’assurer une plus grande cohérence des politiques . Espérons que ces engagements soient tenus ces prochaines années pour que la Belgique réponde enfin aux impératifs énoncés dans la Convention d’Istanbul [14], tel que le réclame le dernier rapport d’évaluation rédigé par le GREVIO[15]. La volonté semble commune, ne laissons pas cette opportunité nous échapper.

[1] Expression désignant l’auto-organisation des citoyen·ne·s indépendamment de l’État, des partis politiques et du monde économique.

[2] Une conférence interministérielle regroupe des ministres des différents niveaux de pouvoir autour de diverses
thématiques.

Auteur
AuteurFlorence Vierendeel